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Stratégie La filière vin mise sur une communication “responsable”

Face au durcissement de la répression contre l'alcool au volant, les professionnels du vin réagissent en incitant plus encore à la modération : partenariat avec la Prévention routière, édition de réglettes mesurant l'alcoolémie, distribution d'éthylotests...Une façon de parler du vin dans une optique “responsable”.

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Nombreux sont les professionnels du vin à évoquer avec amertume ce qu'ils nomment “l'effet Sarkozy”. Le durcissement de la répression de l'alcool au volant amorcé sous l'égide du précédent ministre de l'Intérieur s'est en effet ajouté à un contexte de baisse de la consommation et de mévente du vin. Avec les mesures de sécurité routière et de santé publique, le vin s'est vu montré du doigt. Comment dès lors lutter contre ce climat et restaurer l'image du vin ? Nombre d'acteurs de la filière ont décidé de réagir et de tirer parti de l'air du temps pour communiquer autrement.

“L'abus d'alcool est dangereux et il n'a jamais été dans notre idée de défendre l'excès. Simplement, nous avons préféré un message plus nuancé et plus positif que celui des pouvoirs publics en disant ‘la modération a bien meilleur goût'”, indique Jacques Couly, président de la commission communication d'Interloire. L'interprofession des vins de Touraine et d'Anjou a lancé cet été 420 000 réglettes “0,5 gramme”, format carte de crédit, pour aider le consommateur à évaluer son taux d'alcoolémie probable en fonction de son poids, de son sexe et du nombre de verres consommés, à jeun ou au cours d'un repas. “Cette carte est un outil intelligent et préventif qui permet au consommateur de se tester et qui l'invite à être responsable”, poursuit Jacques Couly. Validées par les préfectures d'Indre-et-Loire, du Maine-et-Loire et du Loir-et-Cher, ces réglettes ont été conçues pour être distribuées auprès des restaurateurs, des cavistes, des vignerons et lors des manifestations viticoles.
Lors de leur foire aux vins en mars dernier à Tours, les vignerons de Bourgueil avaient d'ailleurs inauguré la campagne.

“La modération a bien meilleur goût” en invitant parmi leurs stands la Prévention routière, venue avec des panneaux d'information et qui proposait aux visiteurs de “souffler dans le ballon”. L'achat d'un verre de dégustation donnait droit à un alcootest et à un guide de dégustation. Même partenariat avec la Prévention routière pour le Bureau interprofessionnel des vins de Bourgogne, qui lors des manifestations viticoles locales cette année, a voulu “affirmer l'engagement de la filière des vins de Bourgogne pour une consommation modérée, maîtrisée et responsable”.

Tout en améliorant l'image du vin d'une manière “éthique”, ces actions ont aussi pour but de “déculpabiliser” l'amateur de vin. A l'occasion de la sortie du Beaujolais nouveau, Inter Beaujolais lance à son tour 20 000 réglettes (vendues 45 centimes d'euros en pharmacie) pour évaluer son taux d'alcoolémie. “L'idée est de faire comprendre aux consommateurs qu'on n'est pas dans le rouge aussi facilement qu'on pourrait le croire, explique Chantal Bernard, responsable du matériel promotionnel à l'interprofession du Beaujolais. Or, au restaurant, les gens ont si peur qu'ils ne boivent plus de vin.”

Concilier le respect de la réglementation avec le plaisir du vin est aussi la position des Vignerons indépendants, qui cet été ont initié une campagne d'affichage dans les caves de leurs adhérents pour sensibiliser les visiteurs à la “consommation et au plaisir responsable”. Les vignerons de Fronton, dans le Sud-Ouest, ont eux voulu aller plus loin. Partis dans une “croisade du bon sens” pour informer les amateurs de vin “au-delà des messages de culpabilisation”, ils ont fait réaliser en juin sous contrôle d'huissier une étude auprès de 95 personnes montrant qu'après trois verres de vin bus au cours d'un repas, 100 % des hommes et 90,8 % des femmes avaient une alcoolémie inférieure ou égale à 0,46 g/l de sang.

Reste à savoir si toutes ces actions auront un impact plus fort que la peur du gendarme et du retrait de points, alors que le gouvernement n'a toujours pas mis en place le Conseil de la modération, dont la création est préconisée par le Livre blanc sur le vin et par “Vin et Société”. Ce Conseil réunirait les administrations, les associations et organisations de santé publique et des représentants de la filière. Il pourrait être, s'il était créé, un groupe de réflexion sur la consommation et la prévention et permettrait d'associer la filière aux actions de prévention en matière de sécurité routière et de santé publique.La filière, par la voix de Vin et Société, s'est déclarée prête à participer, y compris financièrement, à des actions de prévention contre l'abus d'alcool.


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